Trick'r Treat, Michael Dougherty

Trick’r Treat : le monde d’Halloween

Je vous retrouve pour vous embarquer dans l’univers d’Halloween en ce célèbre jour du 31 octobre. Citrouilles, monstres et friandises, une célébration très appréciée en occident, mais connaissez-vous vraiment l’histoire de cette fête ?

Préparez vous à une orgie de citrouille, c’est de circonstances

Afin de mieux vous expliquer cet univers et de vous y faire voyager, je vais vous tout d’abord vous parler de la bande dessinée qui m’a donné envie d’écrire cet article : Trick’r Treat (littéralement « Farce ou Friandise » en anglais ou chez nous « des bonbons ou un sort »).

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eCouverture de Trick’r Treat, Hachette Comics

Je suis tombée sur ce comics lors de l’une de mes pérégrinations dans ma librairie BD préférée. J’étais ce jour-là à la recherche d’une lecture fantastique et un peu creepy pour ce bon mois d’Octobre. Furetant, de tables en étagères, je suis finalement tombée sur cette couverture attrayante : effrayante avec un petit côté Spielberg : elle nous met directement dans l’ambiance d’Halloween et nous promet une belle séance de lecture, idéale pour la saison !

Trick’r Treat est une bande dessinée américaine créée à l’initiative de Michael Dougherty en 2015 et qui raconte 4 histoires différentes autour d’Halloween. C’est une œuvre collective : le scénario de toute l’œuvre a été imaginé par une équipe tandis que pour chaque histoire intervient un illustrateur(trice) et coloriste différent. En France, la BD est éditée chez hachette Comics.

De quoi ça parle ?

Dès le début nous sommes plongés dans la nuit d’Halloween, à notre époque, dans une discussion entre une petite fille et son grand père. Le grand père, afin de rassurer sa petite fille qui est effrayée par l’ambiance de cette soirée, entreprend de lui raconter 4 histoires autour d’Halloween. Ainsi, par l’initiative du personnage du grand père, nous sommes immergés dans plusieurs histoires qui ont lieu à des époques différentes comme la première qui se déroule au 17e siècle en Irlande, terre de naissance d’Halloween.

Pourquoi c’est bien ?

Les histoires sont très immersives avec chacune une époque et une atmosphère bien retranscrites via les différents illustrateurs. Les intrigues sont également intéressantes et plaisantes à suivre. Si on veut chipoter, je dois bien avouer qu’une seule de ces histoires ne m’a pas convaincu à 100% mais cela est dû au dessin qui ne me plaisait pas donc c’est finalement très subjectif. Mon histoire préférée, par contre, est la quatrième grâce à la vision qu’il donne d’Halloween : une vision à la fois touchante et effrayante !

Je pense véritablement que cette bd vaut le détour pour quiconque est fan de fantastique mais aussi pour tous ceux qui veulent un peu se faire un peur pour la période d’Halloween ! C’est une dose de frisson très agréable à lire sous un plaid !

Trick'r Treat, réalisé par Michael Dougherty
Trick’r Treat, réalisé par Michael Dougherty

C’est en lisant la préface de cette BD, écrite par Michael Dougherty lui-même, que j’ai appris qu’à l’origine, Trick’r Treat est un film ! Réalisé en 2007 par le fameux Dougherty, Trick’r Treat est devenu culte en Amérique du nord malgré une sortie directement en DVD en 2009, sans distribution en salles. Michael Dougherty à qui l’on doit aussi le film Krampus entre autres, qui lui s’attaque à Noël, a voulu créer la bd afin de prolonger le plaisir du film et de faire patienter les fans qui réclament vivement une suite à Trick’r Treat depuis de nombreuses années : une suite qui serait possiblement en projet si l’on en croit la préface.

De quoi ça parle ?

Trick'r Treat, Michael Dougherty
Trick’r Treat, Michael Dougherty

Le film ressemble à la bd dans le sens où l’action se centre (évidemment) sur Halloween et dans le fait que l’on suit plusieurs personnages comme autant d’intrigues différentes. Néanmoins, dans le film, toutes les histoires se déroulent lors de la même soirée dans une petite ville des Etats-Unis. On y suit un couple, un groupe d’enfants bizarres, quatre jeunes femmes en quête d’amusement, un vieil aigri et un psychopathe aux idées tordues lors de la soirée du 31 Octobre.

Pourquoi c’est bien ?

Tout d’abord, le film réussit très bien son côté atmosphérique avec des maquillages, des costumes et des décors forts bien exécutés. En outre, ses effets spéciaux  parviennent vraiment à nous faire croire à la dimension fantastique du film car ils sont très organiques ! En effet, le film fait très peu appel aux effets numériques et quand ceux-ci interviennent, on constate qu’ils ont relativement bien vieillis.

Trick'r Treat, réalisé par Michael Dougherty
Trick’r Treat, réalisé par Michael Dougherty

Mais le meilleur avec ce film, c’est qu’il te balade du début à la fin : c’est ainsi très agréable d’avoir un sentiment de surprise qui se mêle à celui de l’effroi. Car oui ce film fait peur. Vraiment. Il se joue de nous, de nos attentes et de nos a priori pour mieux nous surprendre et nous effrayer. Un tour de maître qui a très bien marché sur moi !

Trick'r Treat, réalisé par Michael Dougherty
Trick’r Treat, réalisé par Michael Dougherty

Ce film mérite son succès et son statut de film culte, un long métrage fort à propos pour la saison, pour frissonner lumières éteintes entre amis lors d’Halloween !

À travers ces deux œuvres, une idée se dessine, une sorte de morale chez Michael Dougherty : le respect de la tradition. De la même manière que dans le film Krampus, une créature s’en prend aux méchants garnements qui détruisent l’esprit de Noël, dans ses œuvres Trick’r Treat, on remarque que majoritairement les victimes sont ceux qui ne montrent aucun respect pour les traditions d’Halloween.

 

 

 

L’origine d’Halloween

Cet article est pour moi l’occasion de vous en dire un peu plus sur la fête d’Halloween ! Pour ce faire, je me suis servie entre autres de l’ouvrage de Jean Markale intitulé Halloween, histoire et traditions qui fourmille d’informations autour de cette fête aux origines très anciennes. J’ai essayé de résumer un maximum étant donné la masse de détails que j’ai pu trouver mais j’ai pu aussi remarquer via mes recherches supplémentaires que tous les experts n’étaient pas forcément d’accord sur certains points de l’histoire de cette fête (bref c’est un joyeux bordel qui s’annonce).

Samain, la fête celtique

Avant Halloween il y a Samain, fête primordiale de l’ancienne culture celtique. Samain était célébrée pour signifier l’entrée dans les « mois noirs » de l’hiver tandis que son opposé, Beltain, amorçait l’arrivée des « mois de lumière » à partir du 1er mai. De plus, l’Irlande est un pays avec une forte tradition d’élevage, l’Hiver est donc synonyme de changement dans la gestion des troupeaux et donc de modification totale du rythme quotidien : la vie en quelque sorte s’endort pour mieux renaître ensuite.

Samain est une célébration qui pouvait s’étaler sur plusieurs jours autour de la date du 1er Novembre ou de la pleine lune la plus proche du 1er novembre (leur calendrier était lunaire). Elle était le moment du nouvel an celtique : un moment de partage, de communion et de réunion où de nombreuses choses capitales se réglaient pour l’année à venir autant sur le plan politique, commercial que spirituel. Cette fête devenait donc le lieu d’accomplissement de nombreux rituels en lien avec la nouvelle année qui s’annonçait.

Le spirituel est aussi très présent à Samain à cause de la symbolique du renouveau du fait de la nouvelle année et également par le lien fort qu’entretenaient  les Celtes avec le cosmos qui pour eux était « une totalité indivisible ».

 » Demeurée longtemps à l’écart des turbulences continentales, et n’ayant jamais été intégrée à l’Empire romain, l’Irlande constitue en effet un authentique conservatoire de traditions et de coutumes archaïques qui font plonger dans un très lointain passé. »

En effet, au moment de Samain, « l’Autre Monde » devenait accessible. La barrière qui séparait le monde des vivants avec celui des défunts et de la magie, se trouvait alors poreuse. Ainsi, les festins grandioses et l’hydromel coulant à flot pendant les célébrations avaient pour but de favoriser ce que Jean Markale nomme « le décrochage », c’est-à-dire un état de connexion supérieur nécessaire pour communier avec « l’Autre Monde ».

Le lien entre Samain et la Toussaint

La Toussait en tant que telle a été créée au 8e siècle après JC à Rome, et fixée au 1er novembre, sous la décision du pape Grégoire III. Puis elle s’est diffusée « dans les territoires carolingiens » à partir de 837 sous la régence de Louis le Pieux. Cette correspondance des deux fêtes à la même date du 1er novembre est due, selon Jean Markale, à la présence de nombreux moines irlandais sur le continent et de clercs formés « dans des monastères insulaires qui se référaient tous au modèle irlandais » et donc aux coutumes irlandaises.

La Toussaint c’est la fête de « tous les Saints », c’est-à-dire ceux qui ont atteint « la Lumière éternelle ». Ce n’est donc pas une commémoration de TOUS les morts mais la confusion se faisait parmi le peuple car il existait déjà des traditions païennes populaires pour célébrer les disparus ou les martyrs. C’est pourquoi fut alors instaurée à la date du 2 novembre « le jour des Morts », qui, à partir de 1050 s’était propagé dans l’ensemble de la chrétienté.

Ainsi, par l’instauration de cette deuxième fête, on avait concilié une fête purement chrétienne avec une réalité païenne populaire toujours existante. Se trouvant face à l’incapacité d’enrayer ces célébrations, l’Eglise chrétienne les a donc incorporé : « D’une façon générale, lorsqu’on ne peut extirper une croyance profondément enracinée dans la mémoire populaire, on la récupère et on lui donne une autre signification, un autre but plus conformes à la nouvelle idéologie ». Ce lien étroit entre chrétienté et paganisme  se retrouve également dans le nom même d’Halloween. Celui-ci proviendrait de la contraction de l’expression archaïque anglaise  All Hallows Even (veille de tous les saints). Au fil de mes recherches, j’ai aussi vu que ce nom pourrait être apparenté à une légende flamande concernant un certain Sire Halewyn.

Snap Apple Night, 1833 par Daniel Maclise. Des enfants jouent au "Snap Apple" lors d'une soirée d'Halloween en Irlande en 1832.
Snap Apple Night, 1833 par Daniel Maclise. Des enfants jouent au « Snap Apple » lors d’une soirée d’Halloween en Irlande en 1832.

Ainsi lorsque l’Irlande fut évangélisée (cela débuta à partir du 5e siècle après J.C.), l’Eglise, certes, mit fin aux rituels de Samain, mais son sens spirituel, lui, fut toléré et respecté. On autorisa donc, lors de la veille de la Toussaint, que le peuple célèbre sa communion avec les défunts et l’Autre Monde du moment que les rites jugés « diaboliques », eux, n’étaient plus accomplis.

Cette cohabitation des pratiques entre Halloween et la Toussaint avait lieu dans le périmètre bien défini de l’Irlande et de l’Ecosse. Cependant, en raison de la grande famine irlandaise du 19e siècle, une vague migratoire s’opéra depuis ces deux pays, vers les Etats-Unis en majorité. En plus de l’espoir d’échapper à la faim, les Irlandais et les Écossais emmenèrent avec eux, leurs croyances et leurs traditions particulières dont la fête d’Halloween. Peu à peu, la célébration se diffusa dans l’Amérique du Nord anglophone puis plus tardivement dans la partie francophone du Canada.

Mais d’où viennent les déguisements, les enfants qui quémandent des bonbons et les citrouilles ?

 

Lors d’Halloween, la frontière entre notre monde et celui des morts disparaît, les défunts peuvent alors venir visiter le monde des vivants (et vice versa). Envers ces âmes revenues de l’Autre Monde, les Irlandais ressentaient crainte, respect et sollicitude : pour le leur manifester on ne sortait pas la nuit mais on laissait les maisonnées ouvertes, le feu crépitant et des victuailles à leur disposition. Du côté des Écossais, on matérialisait concrètement les revenants en grimant des citoyens.

L’habitude du porte à porte, elle, commença au Moyen Âge avec les « soul cakes » (les gâteaux de l’Âme) qui étaient distribués aux alentours de la Toussaint aux pauvres et aux enfants en échange de récitations de prières dans les îles Britanniques. Les bonbons que quémandent désormais les enfants sont donc l’évolution moderne de ces fameux gâteaux ainsi que l’évocation lointaine de la nourriture qu’on laissait aux revenants de l’Autre Monde. De l’autre côté, les déguisements actuels proviennent de la tradition écossaise d’incarner les défunts. Néanmoins, avec l’arrivée de la chrétienté et de sa crainte du diabolique, le déguisement revêt une autre fonction, celle de la protection :  « Et si l’on revêt des masques horribles, durant cette nuit d’Halloween, c’est aussi pour faire peur aux esprits diaboliques, tout au moins pour leur montrer qu’on fait partie de la même troupe ». Avec les différentes migrations, ces coutumes se sont mélangées et ont évoluées pour aboutir au final à notre Halloween moderne.

La citrouille ou la légende de Jack O’ Lantern

La citrouille est indissociable d’Halloween, comme une mascotte, elle est à tous les coins de rue et trône fièrement devant les maisons. La bougie placée à l’intérieur, brûle de manière malicieuse et fait ressortir le dessin creusé à même la chair de la citrouille. La lumière, rougeoyant dans cette dernière, représente alors le feu qu’on laissait dans les maisons pour réchauffer les revenants mais également celui qui permettait de repousser les entités maléfiques: l’éteindre avant la fin de la nuit est donc de mauvais augure comme l’apprendront les personnages du film Trick’r Treat.

Une légende irlandaise rapporte l’histoire d’un certain Jack, un roublard alcoolique très malin qui réussit à berner plusieurs fois le Diable pour que celui-ci ne l’emmène pas en Enfer. Malheureusement pour lui, lorsqu’il mourut, sa mauvaise vie lui ferma les portes du Paradis tandis que ces manigances contre le Diable, lui fermèrent également les portes de l’Enfer. Condamné à revenir sur ses pas pour une errance éternelle, Jack demanda au Diable un coup de pouce pour arriver à se repérer dans le noir. Le Diable lui confectionna alors une lanterne en plaçant des braises dans un navet creusé, d’où le nom de Jack O’Lantern !

Néanmoins cette pratique n’a pas été créée par cette légende. Les habitants des îles Britanniques avaient déjà l’habitude de fabriquer des lanternes en creusant des navets. Ailleurs, dans les Vosges, il existe une pratique similaire nommée « la noyade des lampes » où des lampions creusés en forme de tête de mort dans des navets devaient être éteints par les passants à leurs risques et périls lors de la soirée du 11 mars avant la Saint Grégoire-le-Grand.

Jack Skellington, personnage principal de L’Étrange Noël de Monsieur Jack, est probablement une image détournée du personnage légendaire de Jack O’Lantern

En arrivant sur le sol américain, les Irlandais délaissèrent le navet pour la citrouille, bien plus pratique car plus grande. Ces lanternes disséminées près des habitations avaient pour but de se protéger contre les esprits malins en réponse aux anciens rites de Samain.

Bien ancrée aujourd’hui dans la culture populaire, la citrouille d’Halloween ou Jack O’Lantern continuera d’illuminer, encore et encore, nos nuits du 31 octobre.

Conclusion

J’espère que cet article a pu vous permettre de découvrir des œuvres alléchantes et d’apprendre quelques informations au sujet de la passionante fête d’Halloween, une célébration bien plus complexe et ancienne que ce que l’on pensait !

On se retrouve bientôt !

 

Sources / Pour aller plus loin :

→ Halloween, histoire et traditions, Jean Markale, 2000.

→ Wikipédia : Halloween, Toussaint,  Lampion et Soul cake

→ Site Guide Irlande.com : Jack O’Lantern et La Samain

→ Les images du film viennent d’Allociné

→ Les gifs viennent de Giphy

 

 

 

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