Euphoria

Après Chernobyl qui a retourné l’opinion, on pensait qu’ HBO n’avait pas encore de quoi en remettre une deuxième couche alors que son programme phare, Game of Thrones, s’était fini après 8 saisons. Mais c’était sans compter Sam Levinson avec Euphoria ,adaptation américaine d’une série israëlienne du même nom. En plus de la série originale, Sam Levinson s’appuie sur son passé d’addict pour nourrir son propos et notamment la trajectoire de Rue.

Euphoria Sam Levinson Zendaya

Rue, jouée par Zendaya, est une adolescente de 17 ans qui revient au lycée après une cure de désintox suite à une overdose. Anxieuse et dépressive, Rue est addict depuis longtemps et cela a bien failli la tuer. On suit son retour au lycée, la vie de ses ami.e.s et surtout le lien qu’elle va nouer avec Jules, une nouvelle arrivante extravertie et lumineuse.

Bien que trash et too much par moment (tant de galères et de drames c’est difficilement réaliste sur tous les points), la série pose de vraies questions et présente la complexité de la jeunesse de notre époque et particulièrement celle des Etats-Unis.

Tous les acteurs et actrices de cette série sont brillants et convaincants. Zendaya est clairement une grande actrice, circulant entre toutes les émotions, des plus douces aux plus violentes. Les personnages évoluent au rythme d’une bande originale travaillée et addictive et sont mis en valeur, eux et leurs tourments, par une atmosphère colorée et réfléchie.

Une esthétique signifiante

Il y a un jeu habile entre le fantasme, la sur-esthétisation et le réel. La caméra filme autant la vie de ces ados qu’elle se plaît à retranscrire leurs émotions et leurs trips sous produits. La réalisation, les lumières, les décors, les costumes et la bande originale léchée participent à auréoler ces jeunes d’une aura mystérieuse et sublime. Néanmoins cette esthétique fantasmée est toujours contrebalancée par d’autres moments mornes et ternes, où ils ne sont plus que l’ombre d’eux même.

On pourrait donc reprocher à la série cette débauche quasi constante de coolitude qui émane parfois des personnages, ce qui tendrait à la rapprocher de teens dramas surfaits. Pour autant jouer sur notre apparence, nous le faisons tous, plus ou moins consciemment. Nous nous rêvons. Comment nous aimerions être perçu, ce que l’on veut dégager. La série montre cette facette de superficialité et de rapport au regard de l’autre mais cela ajoute de la profondeur quand on comprend que c’est une mise en scène, parfois positive quand il s’agit de s’exprimer ou de s’assumer mais aussi une manière de jouer un rôle et que derrière la scène, les coulisses sont peu reluisants.

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Maddy , crédit HBO

Doniella Davy, la maquilleuse qui a œuvré sur Euphoria a profondément réfléchi sur la signification des maquillages en fonction des personnages et de leur état émotionnel. Elle part du principe que le maquillage et tous les attributs extérieurs comme les vêtements et les accessoires participent à une réinvention de soi et donc, que cela dit toujours quelque chose de nous. Ainsi, si on y prête attention, on comprend que la façon dont ces jeunes se présentent au monde révèle en grande partie leur intériorité et leur lutte avec eux-même. Maddy, ancienne reine de beauté qui se permet avec un aplomb total de porter des brillants partout sur les yeux, tombera le masque quand plus rien ne sera sous son contrôle. Jules, qui malgré les épreuves est solaire et empreinte de positivité arborera la plupart des temps des maquillages aux teintes pastels ou néons avec des contours flous.

Rue, quand à elle, est souvent « négligée », emmitouflée dans sa dépression et sa tristesse. Quand elle porte du maquillage c’est souvent des paillettes qui produisent comme un effet de larmes assumé ou plus graphique. Les paillettes évoquent ce scintillement mental de la drogue qui rend le monde plus beau, pour autant elles ornent toujours ses joues comme des larmes car elles sont pleines de sel et de désillusion.

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HBO

Le revers de la médaille

Le monde occidental a vendu un rêve dont la profondeur est absente. Faisant ainsi du cancer, de la dépression et de l’anxiété des maladies terriblement communes. Aux Etats-Unis où la prescription d’anti-douleurs puissants se fait comme un rigole, l’addiction aux opiacés et aux drogues est légion et touche un spectre très large de personnes.

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Pour autant, l’adolescence est le parfait moment à filmer pour questionner cette recherche du sens. Cette phase de construction et d’expérimentation est aussi la fracassante rencontre avec la réalité de ce que sera peut-être notre vie. Et quand cette rencontre n’est pas agréable, un petit cachet apparaît parfois comme une solution temporaire, un pansement.

C’est une jeunesse désabusée qui est évoquée ici. Les parcours familiaux sont complexes et les parents, ravagés pour la majorité par le système, transmettent à leurs enfants leurs peurs et leurs travers.

Ainsi Euphoria a beau regorger de lumières et de paillettes, la noirceur de la vie et de ses épreuves n’est jamais loin et prend régulièrement toute la place à l’écran. C’est une série indéniablement belle et puissante. Une sacrée claque. La seule qui depuis longtemps m’a donné très envie de rentrer chez moi du travail pour la regarder. Jetez y un œil et si c’est déjà fait n’hésitez pas à partager votre avis en commentaire.

 

Sources / Pour aller plus loin :

There’s a Reason You Can’t Stop Obsessing Over the Makeup on ‘Euphoria’ – by

Euphoria’s Head Makeup Artist Shares Why You’ve Never Seen Makeup on Television Like This Before – by Devon Abelman

→ Instagram de Doniella Davy : @donni.davy

5 commentaires

  1. gambling

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    1. lapetitecreature

      C’est très gentil de ta part. En fait dans la vie je suis, entre autre, rédactrice web freelance et sous certains aspects ça peut parfois se rapprocher de journaliste malgré des différences certaines entre les deux professions. En tout cas, le plus important pour moi c’est de parvenir à transmettre à travers l’écrit donc si tu trouves que j’écris bien ça me touche beaucoup 🙂 Merci à toi et n’hésite pas à me donner ton avis si tu regardes Euphoria 😉

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